Guy Chauvier, Jazz Classique, 11 mai 2011

Une bonne partie de la meilleure production discographique actuelle se situe aux frontières du mainstream et du bop. Le disque de Philippe Pilon entre dans cette catégorie. Il en est même un des plus beaux spécimens récents, sinon la perle. C’est une très bonne surprise, d’autant que ce jeune musicien (né à Suresnes en 1973), ne compte pas encore parmi les plus connus du jazz hexagonal. Gageons que ce disque totalement réussi changera un petit peu la donne. Voilà donc un nouveau saxophoniste ténor, avec une belle qualité de son, un phrasé relaxe, du goût pour les histoires bien construites, une grande variété rythmique... Il allie la robustesse des Texans et une grâce toute getzienne sans oublier, évidemment, Lester Young qui fut un de ses premiers maîtres.

Le charme du CD vient également des six thèmes originaux, tous signés par le saxophoniste, des thèmes en totale osmose avec le style de l’instrumentiste, des thèmes qui chantent, qui donnent envie de chanter. Et quand il reprend un standard, Philippe Pilon se l’approprie, le rajeunit. Ecoutez-le exposer Blue Turning Grey…

Je ne surprendrai personne en affirmant que la rythmique formée par Pierre Christophe (p), Raphael Dever (b) et Guillaume Nouaux (dms) est idéale. Deux invités, les trompettistes Julien Alour et Jérôme Etcheberry, participent eux aussi avec bonheur à cinq titres.

Take It Easy, une véritable profession de foi !

Jacques PESCHEUX, Jazz Dixie Swing, mai 2011

Voilà un disque qui répond parfaitement à son titre. Philippe Pilon est un jeune saxophoniste ténor, dont je n'ai eu connaissance que récemment, et qui s'exprime dans un style hérité de Lester Young avec une décontraction remarquable, des idées qui s'enchaînent sans se heurter, une sonorité aérienne qui lui est bien personnelle.

Il est accompagné par Guillaume Nouaux à la batterie, Pierre Christophe au piano et Raphaël Dever à la basse, des musiciens qui conviennent bien à son style et qui apportent un excellent soutien rythmique et harmonique.

On trouve dans ce CD 10 interprétations allant des ballades comme « Ghost of a Chance » et du blues lent (« How Long Blues ») à des thèmes quelque peu boppisant (« Never too Late », « Sulkin ») en passant par des swingers comme « Chicken Walk » , une bossa (« L'Elfe ») et une composition du chef intitulée « Take it Easy » mieux appelée « Lester's Around » dont la partition figure sur le livret.

Je ne vais pas faire l'inventaire critique de toutes ces interprétations, mais je voudrais insister spécialement sur les premiers chorus de « Blue Turning Grey Over You » qui donnent la meilleure idée du talent de Philippe Pilon. Il expose le célèbre thème à sa façon, adaptant la mélodie à son tempérament par de subtiles décalages, puis il passe au second chorus en survolant les mesures d'une manière typiquement lesterienne et on se retrouve presque sans s'en apercevoir dans les variations du chorus suivant. Ce que j'admire spécialement c'est sa parfaite aisance (le mot décontraction est insuffisant), il prend son temps, il pose ses notes et les laisse produire leur effet avant de repartir de plus belle. Une autre interprétation à écouter en priorité, avant de goûter les autres, est « Chicken Walk » un swinger en tempo medium, qui débute par quelques chorus de piano percutant qui installent un swing pénétrant, le thème (original) est ensuite exposé par le ténor et Jérôme Etcheberry (invité pour trois morceaux), solo de ténor suivi d'un autre excellent solo de trompette de l'invité, intervention de basse et conclusion. Le team Guillaume Nouaux/Raphaël Dever fonctionne en parfait accord , la souplesse et la précision de la ligne de basse s'alliant à la finesse de percussion du batteur.

Voilà un disque, et un musicien que je vous conseille de découvrir. Nous aurons d'ailleurs bientôt l'occasion d'en reparler.

Pierre Chavey, Lion, avril 2011

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Pierre de Chocqueuse, blog de Choc, jeudi 24 mars 2011

Le même soir, Philippe Pilon donnait un concert au Sunset pour fêter la sortie de “Take it Easy”, album récemment chroniqué dans ces colonnes et dont je dis le plus grand bien. N’ayant point le don d’ubiquité, mon cœur balançant entre la musique d’Enrico et celle de Philippe, j’assistai à son premier set, découvrant avec plaisir qu’un nombreux public de connaisseurs remplissait le club. Accompagné par les musiciens de son disque, Philippe Soirat remplaçant Guillaume Nouaux indisponible à la batterie, le saxophoniste nous en fit entendre les principaux thèmes, des compositions originales (Take it Easy, Chicken Walk, Sulkin’) et des standards (Blue Turning Grey Over You), y ajoutant I Surrender Dear, ballade dans laquelle il se fait miel, et une version funky et capiteuse du Soul Sister de Dexter Gordon. La sonorité moelleuse et chaude de son ténor, Philippe la met au service du bop et du swing qu’il approche de façon constamment mélodique. Une esthétique qu’il partage avec ses musiciens qui nous offrirent des chorus plein de joie, Pierre Christophe en grande forme parvenant à tirer le maximum de son piano droit, ses notes lumineuses éclairant le club comme si un grand soleil d’été y plongeait ses rayons.

Pierre de Chocqueuse (BlogdeChoc), Douceur d’un sax lesterien, 21 mars 2011

Dans les notes de livret qu’il a tenu à rédiger lui-même, Philippe Pilon avoue avoir pris tout son temps pour préparer ce disque, son premier. Il souhaitait y apporter ses propres compositions, en peaufiner les arrangements pour que son album ne soit pas un simple objet de consommation parmi tant d’autres albums oubliables. Philippe a eu bien raison, car il se distingue immédiatement des autres par un swing jubilatoire qui manque à de nombreuses productions actuelles. Non qu’il faille nécessairement associer au jazz le balancement de la syncope - certains disques de jazz moderne ne swinguent pas ce qui ne les empêche pas d’être excellents - , mais à une époque de confusion des genres, l’emploi de cette pulsation souple et (re)bondissante abusivement associée au seul jazz classique (il en marqua certes l’histoire), procure un plaisir indicible. Etrange parcours que celui de ce saxophoniste qui, après une adolescence consacrée au rock, au ska et au reggae, découvre à 18 ans le jazz de Lester Young, avec A Ghost of a Chance - « un choc profond » - qu’il ne pouvait manquer inclure dans son répertoire. Le saxophone, Philippe Pilon le pratique dès sa jeunesse. Il a huit ans lorsqu’il choisit de l’étudier, commence par l’alto puis adopte le ténor. Il enseigne aujourd’hui l’instrument dans différentes écoles et conservatoires et en milieu scolaire. Ce disque a d’ailleurs été enregistré dans le théâtre du centre culturel Athénée de Rueil-Malmaison. Philippe y donne des cours depuis 1997 et s’y sent parfaitement à l’aise. La musique de “Take It Easy” témoigne de cet état d’esprit. Le saxophoniste l’aborde avec douceur et décontraction. Ses phrases élégantes et souples s’attachent à l’esthétique. Hantées par le blues, ses improvisations mélodiques en profitent. Dans son texte, Philippe révèle que ses idées musicales lui viennent en marchant. Il chante et rythme de ses pas les mélodies qu’il invente, trouvant ainsi pour elles le meilleur tempo possible. Avec Pierre Christophe au piano, Raphaël Dever à la contrebasse et Guillaume Nouaux à la batterie, il dispose d’un excellent quartette que complètent dans certaines plages les trompettistes Julien Alour et Jérôme Etcheberry. De bons compagnons de jeu, l’aspect ludique de la musique recouvrant d’un voile pudique les difficultés techniques rencontrées. Le thème qui donne son nom à cet enregistrement est un riff inspiré par un solo de Lester. Egalement composé par Philippe, Sulkin’ se base sur les harmonies de Honeysuckle Rose. Le tempo est vif dans Never too Late et les chorus fiévreux se succèdent jusqu’à la coda. La belle trompette de Julien Alour expose le thème à l’unisson du ténor puis le laisse s’envoler. Celle plus classique de Jérôme Etcheberry s’invite dans trois autres morceaux. Marqué par le blues, Ghost Town et son thème aérien bénéficient d’une walking bass efficace et d’un piano inventif. L’Elfe, calypso au swing irrésistible, donne réellement envie de danser. Musicien caméléon, Pierre Christophe maîtrise blockchords et jeu en single notes, joue aussi bien un piano modal que du blues et du bop et fait merveille dans cette séance. Outre A Ghost of A Chance, superbe ballade qu’interpréta Lester et que chantèrent aussi Billie Holiday et Ella Fitzgerald, ce disque renferme I Found A New Baby et Blue Turning Grey Over You, standards que l’amateur de jazz affectionne. Il permet de découvrir les compositions et le chant d’un saxophoniste que l’on aurait tort d’ignorer.

Pierre de Chocqueuse / Blog de Choc, 3 mars 2011

Le label Black & Blue dont le grand timonier Jean-Pierre Tahmazian possède de grandes oreilles, m’a récemment fait parvenir deux excellents disques, “Bleu outre mémoire” du PG Project, formation du tromboniste Pierre Guicquéro, et “Take it Easy”, premier enregistrement de Philippe Pilon, saxophoniste et compositeur talentueux. Tous deux pratiquent un jazz moderne ancré dans la tradition. Ils ne cherchent pas à innover, certains morceaux de leurs albums sont plus réussis que d’autres, mais leur musique conviviale aux notes blues et bleues n’oublie jamais de swinguer.

Ce saxophoniste nourri de blues et de tradition a donc eu la bonne idée de me faire parvenir son disque. On y découvre un jeune amoureux de Lester Young dont le ténor est ancré dans le swing. Philippe ne révolutionne pas le jazz, mais en souffle avec bonheur les notes généreuses. Les musiciens qui jouent sur son premier opus seront tous présents. Le pianiste en est Pierre Christophe. Raphaël Dever à la contrebasse et Guillaume Nouaux à la batterie assurent la rythmique. Deux trompettistes, Julien Alour et Jérôme Etcheberry se partagent quelques chorus. On ne peut qu’applaudir l’album. Il donne envie d’en écouter les musiciens sur scène, d’en goûter autrement les morceaux qu’il contient.

Classica n°130, mars 2011

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Sophie Chambon, Chroniques DNJ (Dernières Nouvelles du Jazz), 1er mars 2011

Voilà un album sérieux, conçu avec soin, qui met en joie d’un bout à l’autre, simplement, résultat plutôt rare en ces temps de recherche d’une modernité éperdue.

Un simple riff, (mais de Lester Young ) qui s’insinue et ne vous lâche plus, a inspiré la première composition Take it easy du saxophoniste ténor Philippe Pilon en quartet, avec Pierre Christophe au piano, Raphael Dever à la basse, et Guillaume Nouaux à la batterie. Lester Young, le saxophoniste en est tellement imprégné, que sa grâce «fantômatique» survole l’album, comme dans ce Ghost of a chance, dont la mélodie le hante.

Qu’il doit être difficile quand on aime le jazz à ce point de choisir quels seront les thèmes de son premier disque. Incroyablement, Philippe Pilon arrive à faire sonner ses propres compositions comme des standards, en cohérence avec les titres qu’il s’autorise à revisiter I found a new baby, Blue turning grey over you.

Le jeu collectif et intelligent du quartet fait retrouver le plaisir du swing, cette pulsation du désir de musique. Jacques Réda essaie désespérément de nous en donner les clés dans les colonnes de Jazz Magazine depuis quelques années mais on avoue, tout comme Frank Bergerot, que le swing demeure un mystère : on l’a ou pas, et …beaucoup de musiciens ne l’ont pas.

Philippe Pilon, lui, avance à son rythme, en quête d’un son bien à lui, velouté et charnel. Pour le reste, timbre, phrasé, invention mélodique se développent auprès de musiciens parfaitement complices, en un ensemble détendu, intensément aimable.

Les notes introductives de Claude Carrière éclairent le propos de l’album : Take it Easy ou l’éloge d’une certaine lenteur, d’une élégante désinvolture qui donne pleine mesure à une sensibilité sans affectation. Avec cet effort attentif pour obtenir « un je ne sais quoi » qui fait la signature, justement.

Adoubé par un tel mentor, le saxophoniste a choisi - et c’est assez rare pour qu’on le souligne - de glisser une notule pour chaque titre, livrant quelques pistes judicieuses. Les titres s’enchaînent aisément : ainsi, Sulkin autorise, sur la grille harmonique du Honeysuckle Rose de Fats Waller, d’improviser à loisir, Chicken walk rappelle que l’inspiration en musique vient souvent en marchant. L’Elfe, en hommage au fils du saxophoniste, sur un rythme de calypso est délicieux ; sans oublier le final, How long blues, de l’aveu même du leader, très «roots», au bout de la nuit, dans ces clubs (autrefois) enfumés, quand ne restent plus que les musiciens.

A une époque où il faudrait presque se justifier de jouer encore du jazz « classique » , voilà une formation qui en a intégré tous les codes, pour notre plus grand plaisir ! Ces musiciens jouent bien, avec grâce, ils savent aussi ce que « swinguer » veut dire et on aime encore ça , même en 2011 !

JazzMag, février 2011

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La Tribune, 28 février 2011

Nos dix concerts de mars en région parisienne

Saxophonistes - Lovano, Pilon, Pedron - et chanteuses -Laïka et Wright (photo) - se disputent la vedette en ce mois de lancement du festival Banlieues Bleues. Notre sélection.

Pilon salue Young

Pour son premier album, ("Take it easy". Black & Blue/ Socadisc) le saxophoniste ténor Philippe Pilon rend hommage au grand Lester Young. Décontraction souple et sonorité pleine sont au rendez-vous avec de nombreuses compositions personnelles. Enregistré dans les conditions du concert, le disque met aussi en valeur le pianiste Pierre Christophe.

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